
Après avoir lu La chute et le Premier homme, j’ai voulu continuer ma découverte de l’oeuvre d’Albert Camus en lisant L’homme révolté. Camus considérait cet essai publié en 1951, comme son ouvrage le plus important.
Dans ce livre très érudit, Camus analyse les sources idéologiques des doctrines totalitaristes du XXème siècle. Il montre comment, notamment, la pensée des philosophes allemands du 19ème siècle, Hegel, Nietzche, Marx, a été utilisée et dévoyée par les révolutionnaires, pour aboutir au nihilisme et aux idéologies totalitaristes (communisme russe, fascisme, nazisme). En effet, les philosophes allemands du 19ème siècle, en voulant faire échapper l’homme à la sujétion divine et à la morale formelle (morale hypocrite et bourgeoise, masque de l’exploitation des plus pauvres par les plus riches) ont malgré eux contribué à la création du nihilisme et du totalitarisme.
Pour Camus, les révolutionnaires du XXème siècle ont tiré de Hegel, l’arsenal idéologique qui a détruit définitivement les principes formels de la vertu. Ils en ont gardé la vision d’une histoire sans transcendance, résumée à une contestation perpétuelle et à la lutte des volontés de puissance.
Camus condamne sévèrement les régimes totalitaires nés des révolutions et notamment le régime communiste russe : propagande, délation, être humain transformé en chose, légitimation du meurtre. La révolution, en voulant faire échapper l’homme à la sujétion divine et à la morale formelle a renoncé à toute revendication morale et a accepté le meurtre et l’a légitimé. Alors, Camus théorise l’opposition entre la « révolte » et la « révolution césarienne » et choisit la révolte. Le combat pour la justice et pour la liberté est à la racine de la révolution et de la révolte. Mais le révolté, pour lutter contre l’injustice, le mensonge et la violence qu’il subit, ne peut accepter de tuer ou de mentir car il détruirait les raisons de sa révolte. Albert Camus réhabilite les valeurs de la morale formelle et de l’esprit de mesure.
La révolté, non plus ne revendique nullement une liberté totale. La liberté absolue n’est que le droit pour le plus fort de dominer. La liberté la plus extrême, celle de tuer n’est pas compatible avec la révolte. La révolte au contraire ne vise qu’au relatif et ne peut prétendre qu’à une justice et une liberté relative. Et Camus termine en faisant l’éloge de la mesure et de la pensée des limites.
L’homme révolté est une œuvre singulière et puissante inspirée peut-être en partie à Camus par son action de résistant. L’auteur y mène une démonstration rigoureuse en s’appuyant sur les ouvrages des principaux penseurs du 18ème et 19ème siècle. Etonnamment, Camus si rigoureux, si soucieux d’exactitude et d’objectivité, dans sa démonstration de la mystification révolutionnaire, termine son livre par une envolée lyrique, exaltant les vertus méditerranéennes (courage, mesure) en les opposant à l’exaltation et aux rêves allemands. Mais à travers ces dernières pages enfiévrées, il réaffirme sa foi en la lutte contre l’injustice et en la solidarité entre les hommes.
Finalement, sa réflexion contre les totalitarismes, son refus des extrémismes, son éloge des valeurs morales et de la mesure allaient à contre-courant des idées dominantes de son époque où une partie importante des intellectuels français, en tout cas les plus médiatiques et influents, étaient séduits par les idéologies d’extrême gauche nées du marxisme ou par le communisme. On sait que Camus a été isolé après la publication de ce livre qui avait été mal reçu par Jean-Paul Sartre et l’équipe de la revue des Temps modernes. A la demande de Sartre, Francis Jeanson publia d’ailleurs un article sur L’homme révolté qui brouilla les deux hommes.
Camus a été un intellectuel courageux, honnête et lucide. Une reconnaissance internationale et prestigieuse lui est venue de l’étranger, lorsque le Prix Nobel lui a été décerné.
Catherine, Tes articles sont toujours aussi intéressants. Bravo pour l’aisance avec laquelle tu nous fais partager tes lectures, y compris les plus complexes à aborder. Je t’embrasse. Marie-José
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Merci Marie-José, cela me fait très plaisir que tu lises mes articles et qu’ils te plaisent! Bises
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Catherine, Tes articles sont toujours aussi intéressants. Bravo l’aisance avec laquelle tu nous fais partager tes lectures, y compris les plus complexes à aborder. Je t’embrasse. Marie-José
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BravoCatherine pour cet article. Tu nous donnes envie de découvrir ce livre avec ton analyse passionnante. Ce sera pour moi à la rentrée car je voudrais avancer et terminer Proust car une exposition Proust aura lieu au musée Carnavalet de fin septembre à fin Janvier. J’avance dans mes lectures. Les vacances bretonnes commencent bien avec « le beau temps retrouvé ». Avant notre arrivée il y a eu une tempête avec un vent de plus de 145 Km /heure : terrible paraît -il ! Mes fleurs et arbustes ont été brûlés Je jardine donc et replante. Maintenant la chaleur est là et les paysages st magnifiques. La mer est bonne on en profite. J’espère que tu vas bien et que tu fais de belles balades et tjrs de belles lectures. Bien amicalement bises. Marie -Louise.
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Très contente que l’article t’ait plu Marie-Louise! Je vois que tu es bien occupée et que tu profites de la mer et du beau temps retrouvé! Et après juillet, il y a août, plein de baignades et bons moments en perspective! Pour ma part, je fais de bonnes ballades! Avec la pluie la végétation est magnifique! Bises
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